NUTRISCORE

Le Nutri-Score : est-il une aide pour une alimentation équilibrée ?

Article écrit par Laura Rifaux, Delphine Florio et Coline Serre, diététiciennes à l’AP-HM, hôpital de la Conception, Marseille.

 

Le Nutri-Score est un outil de classification des produits alimentaires.

Il a été développé pour faciliter la compréhension des informations nutritionnelles par les consommateurs et ainsi les aider à faire des choix éclairés.

 

Qu’est-ce que le Nutri-Score ? Comment a-t-il été mis en place ?1

Ce logo a émergé dans le cadre de la loi de modernisation du système de santé du 26 janvier 2016 afin de faciliter l’accès à une alimentation équilibrée et de limiter l’apparition de certaines pathologies (acte de prévention en santé publique). Il a été mis en place pour la première fois en France en 2017.

Il concerne tous les aliments transformés et toutes les boissons (excepté les herbes aromatiques, le thé, le café, les boissons alcoolisées).

Il s’agit d’un système graphique : les produits sont classés par lettres et couleurs allant de A (vert), pour les plus favorables, à E (rouge), pour les moins favorables. Il prend en compte la valeur nutritionnelle pour 100g de produits. Il vient en complémentarité de la déclaration nutritionnelle rendue obligatoire depuis le 13 décembre 2016 sur les emballages par règlement européen EU n°1169/2011 appelé « INCO » pour l’Information du Consommateur sur les Denrées Alimentaires.

L’application du Nutri-Score est basée sur le volontariat des industriels. Toutefois, on a noté un accroissement de la participation des entreprises en 2020.

 

Comment les produits sont-ils classés de la lettre A à E ?

Afin de déterminer à quelle catégorie un produit correspond, un algorithme a été déterminé. Celui-ci prend en compte :

  • pour les facteurs « bénéfiques » : la part de fruits et légumes, légumineuses, protéines et fibres dans le produit.
  • pour les facteurs « délétères » : les calories, la présence d’acides gras saturés, de sel et de sucre dans le produit.

Un aliment riche en fibres, en protéines, en fruits et légumes sera noté favorablement. En revanche, un aliment ayant une teneur énergétique importante, riche en gras, en sucre et en sel sera noté défavorablement.

 

En pratique, …. « comparez ce qui est comparable ! » 

Nous attirons l’attention du consommateur afin que les comparaisons de produits soient cohérentes. En effet,  il est important de confronter :

  • soit des produits d’un même groupe alimentaire,
  • soit un même produit mais de marque différente.

Comparer un litre d’huile d’olive Nutri-Score « C » avec des chips Nutri-Score « A » n’amène pas le consommateur à avoir un raisonnement intéressant. L’huile a un intérêt nutritionnel ce qui n’est pas le cas des chips. Le classement seul ne donne pas toutes les informations.

Certains aliments sont classés sévèrement de par leur composition comme par exemple, les matières grasses ou produits en contenant comme les huiles, les beurres, les crèmes fraîches, les fromages. Ils peuvent donc être jugés « mauvais » par le consommateur alors qu’en quantité adaptée, ils sont nécessaires à l’équilibre nutritionnel. D’autres comme les produits sucrés tels que le miel et la confiture peuvent également être jugés « mauvais » alors qu’une consommation modérée n’est pas incompatible avec l’équilibre alimentaire et permet d’apporter une notion de plaisir.

 

Le Nutri-Score en quelques chiffres2

  • 90 % des français connaissent le système d’étiquetage
  • 94% des français déclarent être favorables à sa présence sur les étiquetages
  • 66% des consommateurs déclarent que le système leur apporte des informations nutritionnelles du produit

 

Avantages et inconvénients du Nutri-Score

 

AVANTAGES INCONVENIENTS
  • Facile à comprendre et rapidement identifiable sur l’emballage.
  • Synthétique.
  • Invite au changement des habitudes sur les fréquences de consommation de certains aliments.   
  • Incite les industriels à améliorer leur recette d’un point de vue nutritionnel.

 

  • Catégorisation un peu trop simpliste des aliments en « bons » ou « mauvais » sans explications complémentaires.
  • Absence de prise en considération des éléments suivants :
    • le degré de transformation des aliments,
    • la présence ou non d’additifs et de pesticides,
  • l’impact de la cuisson ou de la préparation du produit sur l’aspect nutritionnel (notamment pour les frites noté Nutri-Score A si ce sont des pommes de terre coupées surgelées et qui présente une qualité nutritionnelle différente si la cuisson est réalisée au four ou en friteuse avec ou sans ajout de sel),
  • la composition en vitamines et minéraux,
  • le mode d’élevage des animaux pour les produits qui en sont issus3.
  • La notation sévère de certains produits tandis qu’ils ne sont pas néfastes en petites quantités (ex : les sardines parfois notées E).
  • L’ajout d’additifs aux recettes pour compenser la diminution de certains ingrédients (ex : ajout d’épaississants E415 ou E407 pour remplacer la crème fraiche et ainsi diminuer la quantité de matière grasse du produit).4
  • L’algorithme à l’origine du classement des denrées est peu transparent. Point perfectible même pour les professionnels.
  • Le Nutri-Score n’est pas appliqué sur les produits à destination des publics à risque tels que les enfants de moins de 3 ans alors que la prévention et l’éducation devraient commencer au plus tôt.

Le Nutri-Score : est-il une aide pour une alimentation équilibrée ?

Un rapport d’évaluation réalisé à 3 ans après la mise à disposition du Nutri-Score n’a mis en évidence que les points positifs et les perspectives d’évolution sans aborder les failles du système.5

 

Quelques exemples en pratique 6

Il y a cacao, et…cacao !  

Voici quelques exemples d’incohérences face auxquelles peuvent être confrontés les consommateurs et qui montrent la limite du Nutri-Score.

NUTRINMED-Cacao

Un produit « 100% cacao » sera d’un meilleur apport nutritionnel qu’un produit riche en maltrodextrine (molécule dérivée du sucre) et pauvre en cacao. Toutefois, une fois dans le rayon concerné l’utilisateur peut se sentir démuni et effectuer des choix non souhaitables par manque d’informations claires.

Cependant, ici, le produit 100% cacao a obtenu un Nutri-Score C  et le produit ayant 20% de cacao et 80% de maltodextrine (sucre) un Nutri-Score A. Les industriels utilisent l’appellation « moins de sucres » car ils remplacent une partie du sucre par un dérivé, la maltodextrine, qui est un sucre complexe avec un meilleur Index Glycémique. De plus, le cacao qui est présent, en plus faible quantité, est un cacao allégé en matières grasses.  Le produit est enrichi en vitamines. Tous ces aspects-là, améliorent son score. Toutefois, il reste pauvre en cacao, riche en sucres et est un aliment ultra transformé.

 

Du coté des plats cuisinés

Ci-dessous, un parmentier de canard est classé Nutriscore B et un hachis Parmentier Nutriscore C.

Qu’est-ce qui les différencie ?

Le hachis Parmentier de canard confit est sensiblement plus calorique, plus gras, plus sucré et moins riche en protéines que le second produit. Pour autant, il est mieux noté sur le Nutri-Score.

Le second produit a une teneur légèrement majorée en sodium. Outre ce point-là, il semble y avoir peu de différences pouvant justifier les scores. Ce qui met en évidence les limites de l’outil.

Nutrinmed - Exemple 2

Nutrinmed-Exemple 3

(sources personnelles)

Certes le Nutri-Score est un outil facile à comprendre par l’immense part de la population. Et les chiffres du rapport d’évaluation du gouvernement publié 3 ans après son initiation montrent qu’il reçoit l’approbation d’une très large part de la population.

 

Le Nutri-Score n’aide malheureusement pas le consommateur à :

  • Avoir une alimentation variée,
  • maintenir une alimentation équilibrée en protéines, lipides, glucides, vitamines et minéraux,
  • limiter sa consommation de produits transformés au profit des produits bruts,
  • aller au-delà de la classification en s’interrogeant sur la composition nutritionnelle (ex ci-dessus du cacao qui est un produit sucré et ultra transformé mais noté « A »),
  • diminuer la fréquence de consommation et les quantités lorsque la note tend vers « D » ou « E » sans pour autant les supprimer.

Ainsi, le Nutri-Score doit rester une aide pour le consommateur qui doit aller au-delà pour mieux comprendre les déclarations nutritionnelles d’un produit, seuls éléments qui lui permettront de faire des choix éclairés.

Cet outil est un pas vers une meilleure alimentation mais ne se suffit pas à lui-seul.

L’équilibre alimentaire ne tient pas qu’à un produit, et il est tout à fait possible de ne consommer que des produits notés A et pour autant avoir une alimentation déséquilibrée.

Nutri-Score se défend sur la difficulté à mettre au point un algorithme fiable prenant en compte tous les éléments cités.

 Par ailleurs, il est envisagé que le Nutri-Score  soit appliqué également à des produits bruts tels que les fruits et légumes. On peut s’interroger sur l’intérêt d’appliquer ce classement à ces aliments.

Même s’il reste perfectible, le Nutri-Score est un outil de prévention largement utilisé et qui contribue à faire évoluer les comportements alimentaires.

Les diététiciens-nutritionnistes sont des experts en nutrition qui peuvent éclairer les consommateurs dans leurs choix alimentaires et personnalisés.

 

L’algorithme du Nutri-Score est en cours d’évolution !

Suite à un appel à contribution lancé durant l’été 2021, opérateurs et associations de consommateurs ont pu faire part de propositions d’évolutions de l’algorithme du Nutri-Score. Sept pays sont engagés dans la gouvernance transnationale de cette révision. L’objectif de ces modifications est le renforcement de l’efficacité du Nutri-Score.

En juin 2022, le comité scientifique du projet d’évolution a proposé une combinaison de modifications de l’algorithme de calcul pour les aliments solides. Les modifications proposées ayant été jugées positives sur la classification et cohérentes avec les recommandations alimentaires, le comité de pilotage a donné un avis favorable pour l’adoption de ce nouvel algorithme.

D’ici fin 2022, un rapport d’évolution de l’algorithme des boissons devrait être publié. Une fois l’algorithme complet adopté, la mise en œuvre du nouvel algorithme du Nutri-Score pourra être déployé dans les pays ayant déjà mis en place le logo.7

 

Références

  1. https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/nutrition-et-activite-physique/articles/nutri-score. Récupéré sur https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/nutrition-et-activite-physique/articles/nutri-score.
  2. https://www.santepubliquefrance.fr/presse/2018/91-des-francais-sont-favorables-a-ce-que-le-logo-nutri-score-soit-present-sur-les-emballages-des-produits-alimentaires.
  3. https://bleu-blanc-coeur.org/faq/le-nutriscore-est-il-un-outil-fiable/.
  4. https://theconversation.com/le-nutri-score-mesure-la-qualite-nutritionnelle-des-aliments-et-cest-deja-beaucoup-99234.
  5. https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/nutriscorebilan3ans.pdf.
  6. https://www.apivia-prevention.fr/prevention-au-quotidien/gourmand-mais-raisonnable/faut-il-prendre-le-nutri-score-a-la-lettre/.
  7. https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/nutrition-et-activite-physique/articles/nutri-score

 

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